La rivière de Pénerf et ses saveurs…
Il ne se passe pas toujours quelque chose à Kervoyal, alors nous sommes allés à Pénerf profiter de sa rivière et de ses oiseaux migrateurs. Nous y avons également rencontré Guillaume Claîte, jeune autoentrepreneur qui s’est lancé il y a à peine un an en proposant des dégustations d’huîtres directement sur le lieu de production: la rivière de Pénerf!
À bord du bateau du passeur, vous naviguerez, parfois au couchant, au milieu de ce magnifique espace naturel qu’est la ria de Pénerf qui vous offrira toutes ses saveurs, qu’elles soient visuelles, olfactives ou gustatives… Il nous dévoilera ses motivations et nous parlera de ses projets.
Mais avant, c’est l’occasion de savoir pourquoi cette rivière a rejoint le PNR et engagé notre commune dans ce magnifique ce projet. Nous allons vous présenter ses caractéristiques et son histoire et vous présenter sa flore et sa faune dont le symbole en est, bien sûr, l’huître.
La rivière de Pénerf est un écrin dorénavant protégé et encadré ou naviguera bientôt, au cœur de son projet pédagogique, le Reder Mor 6, ce goémonier futur représentant de Damgan.
Mais la rivière de Pénerf c’est avant tout un lieu magique et éternel ou nous aimons admirer, sans le ressac, les couchers de soleil…
Sommaire:
D’un point de vue géographique:
Une richesse qui a fait vivre l’homme:
Le PNR, une nouvelle richesse?
Entretien avec Guillaume Claîte.
La rivière de Pénerf
D’un point de vue géographique:
La rivière de Pénerf est très ramifiée et comprend de nombreux étiers et vasières qui se découvrent à marée basse sur de grandes étendues. C’est un « pré salé » dense qui colonise le fond des différents étiers, y compris les salines abandonnées.
Les cours d’eau du bassin versant sont nombreux à l’alimenter:
– la rivière de la Drayac, la principale, sur Berric, Lauzach, Ambon, la Trinité-Surzur et Surzur;
– le ruisseau du Loc passant par Ambon;
– le ruisseau de l’Epinay à Surzur;
– l’étier du Lic entre Ambon et Damgan;
– l’étier de Caden, entre Surzur et le Tour du Parc;
– l’étier de Kerboulico sur Sarzeau.
Cette ria est profonde de 15 km avec des parties larges, jusqu’à 500 m et quelques zones de resserrement. Sa superficie est de 136 km2 et son altitude minimale est de -5 m et au maximum de 25 m.
Une richesse qui a fait vivre l’homme:
La rivière de Pénerf est naturellement un lieu favorable pour y vivre et commercer. C’est pourquoi toutes les périodes archéologiques y sont représentées.
Son origine (du tertiaire), sa forme (en étoile) et son débit ont été fortement influencés par les variations du niveau de la mer et les mouvements du continent suite aux tremblements de terre dus aux failles (une vingtaine de magnitude 5 rien qu’au XXe siècle!).
La prospérité du port de Pénerf commence réellement au XIIIème et XIVème siècle dans la foulée de la construction du château de Suscinio (1218). A cette époque, tout au long des étiers, s’échelonnent de multiples petits ports (aujourd’hui inaccessibles) ou sont débarqués vin et goémon (engrais indispensable de l’époque) et s’embarquent sel et céréales de Rhuys vers les pays ibères et les nations du Nord.
Le XVIème siècle est l’âge d’or pour Pénerf qui est alors le quatrième port breton. Les marins de la rivière se sont spécialisés dans le cabotage et ne comptent que très peu de pêcheurs. Le nom du port figure sur toutes les cartes marines, même celles couvrant toute l’Europe, sous des orthographes diverses (Pennerff, Penerph, Penhers voire même Pencore).
La légende locale voudrait qu’en 1666 la Compagnie des Indes s’y installe, mais une erreur de navigation serait à l’origine du choix du Blavet et de Lorient! En fait la taille et le tonnage des nouveaux navires de commerce ne permettaient déjà plus, à l’époque,de franchir les passes. A partir de là, le trafic maritime se réduit peu à peu.
Au XVIIIème siècle se développent les salines, mais l’abolition de la taxe sur le sel, en 1848, et l’autorisation d’importer marquent le début du déclin. L’exploitation des marais salants se poursuivra jusqu’aux années 30.
Aujourd’hui ce sont les pêcheurs, les ostréiculteurs et les oiseaux qui se partagent ces étiers calmes et préservés dont on redécouvre sans cesse les richesses.
Une richesse naturelle toujours vivante:
La Flore:
L’écosystème y est typique du « pré salé » (ou schorre) à savoir une étendue naturelle plane à végétation basse située à proximité du bord de mer, inondée par les eaux salées uniquement lors des marées hautes. Il correspond à la partie de l’estran qui forme la frange haute des marais maritimes.
Le schorre recèle des communautés végétales variées, composées essentiellement d’espèces tolérantes à la salinité.
Selon le degré de submersion, 3 niveaux de végétation s’y succèdent:
- Le bas schorre, qui est recouvert à chaque marée, excepté en morte-eau, est colonisé par des plantes, telles que la soude maritime et l’aster maritime.
- Le moyen schorre présente une végétation d’aspect buissonneux due à l‘obione.
- Le haut schorre quant à lui comporte des salicornes, des spartines, de l’atropis, des lavandes de mer ou de l’armoise.
La faune:
La rivière de Pénerf est un des sites majeurs en Europe pour la migration et l’hivernage des anatidés (oies et canards) et des limicoles (petits échassiers).
Les pointes et platiers rocheux y sont des reposoirs de marée haute et les estrans vaseux jouent un rôle essentiel de gagnage nocturne pour de nombreuses espèces.
Signalons que le site accueille l’avocette élégante ainsi que des effectifs d’importance nationale pour plusieurs espèces : spatule blanche, tadorne de Belon, grand gravelot, barge rousse, courlis cendré et chevalier gambette. Et bien sur nos amies les Bernaches!
En période de reproduction c’est également un site d’alimentation pour l’échasse blanche et l’aigrette garzette notamment. A noter, une colonie de sternes
pierregarin d’importance régionale sur l’îlot de Riom.
Sinon, à part quelques poissons communs, le plus célèbre animal de la rivière de Pénerf est l’huître! En effet, c’est le lieu idéal pour son épanouissement et son goût, à la fois grâce à l’eau douce et l’eau de mer, sa chaire est ferme et son parfum est légèrement iodée et en fait l’un des fleurons de la production bretonne.
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La « Pénerfine »:
Les premiers parcs ou concessions apparaissent en rivière de Pénerf dès 1858. Ce sont les plus anciens du Morbihan, mais il s’agissait de parcs de stockage. Les techniques d’élevage ne seront maîtrisées que vers 1875 et c’est alors que l’ostréiculture va se développer professionnellement en parallèle de l’exploitation du banc naturel.
Or, celui-ci disparaît en 1890 du fait combiné du braconnage et d’une mauvaise gestion des efforts de dragage. Il sera partiellement reconstitué grâce à son réensemencement avec des huîtres issues de… l’ostréiculture.
On comptait 15 concessionnaires en 1860 pour une superficie totale de 2 ha de concessions contre 53 entreprises et 235 ha de concessions en 2007 ! La plus forte concentration est sur Le Tour du Parc avec 34 ostréiculteurs, suivi par Damgan avec 10 ostréiculteurs.
Trois espèces d’huîtres y ont été successivement élevées. L’huître plate fut la première. En 1960, elle sera protégée par décret contre l’huître creuse (moins onéreuse à produire) d’origine portugaise. Mais cette dernière sera décimée en 1970 par une grave épizootie alors que l’huître plate disparaîtra, suite aux maladies de 1974 et 1980.
De nos jours l’huître plate revient marginalement alors que la « Japonaise » a remplacé la « Portugaise » et que commencent à apparaitre deux phénomènes: la mortalité des naissains (dont on ignore la cause) et les huîtres dites « triploïdes », modifiées pour ne pas se reproduire (bin oui, il paraît que certain les aiment moins quand elles sont amoureuses… sans doute des frustrés!).
Le PNR, une nouvelle richesse?
La rivière de Pénerf est dorénavant intégrée au Parc Naturel Régional du Golfe du Morbihan (le PNR). Il a mis du temps à se faire, mais c’est fait depuis deux ans! Celui-ci comprend 29 communes unies par une charte dont les 3 axes sont « Faire des patrimoines, un atout pour le territoire », « Assurer pour le territoire un développement soutenable » et « Mettre l’homme au cœur du projet de territoire ».
Ce projet se développera autour de fortes valeurs de préservation et de valorisation du lieu et qui se mettront en place progressivement.
Ce projet mutualisé d’ampleur nationale offrira donc à la fois des perspectives écologique, pédagogique et touristique, mais aussi quelques contraintes notamment du point de vue de l’urbanisme et du respect de la nature.
Mais c’est avant tout une réelle chance pour la rivière capable de s’offrir, avec des moyens conséquents, la pérennisation de son écosystème et la visibilité nécessaire à son rayonnement auprès de tous.
Nos sources: Natura 2000, Asso eau-et rivière, pnr.fr, wikipédia, Damgan Histoire et Patrimoine, etc…
Entretien avec Guillaume Claîte
Bonjour Guillaume, vous avez débuté lors de l’été dernier vos croisières dégustation sur la rivière de Pénerf, comment vous est venue cette idée? L’idée m’ est venue en observant le port et cette rivière, du moins ce que j’en voyais de la jetée, et j’ai demandé au passeur de m’emmener un jour sur la rivière et en découvrant cet estuaire qui s’ouvrait devant moi, l’idée d’offrir une dégustation sur l’eau est apparue comme une évidence qui compléterait l’offre déjà existante de celle se faisant à terre… Les huîtres n’y ont pas le même goût !!!
Vous êtes un jeune autoentrepreneur, est-ce difficile de se lancer dans une activité telle que celle-ci qui nécessite beaucoup d’organisation et qui dépend partiellement de la météo?
Se lancer toujours un challenge, pas une difficulté, le plus dur est de trouver les bons interlocuteurs pour connaître la législation et les diplômes ou formation nécessaire pour effectuer cette prestation.
Pour la météo… j’y suis tributaire, mais le temps me permets d’en faire et sous toutes les conditions hors mis la pluie… la rivière se dévoile différemment! À ce jour, seule une balade a été annulée.
Vous êtes sarthois, comment êtes-vous arrivé à Damgan? Qu’est-ce qui vous a motivé et séduit dans le choix du port de Pénerf?
Je suis arrivé en 2006 a Damgan et découvert Pénerf comme tout damganais et plus encore quand j’ai commencé à y vivre en 2010. Rapidement j’ai été passionné par cet environnement et cette vie qui lie les hommes et la mer que ce soit via les ostréiculteurs, le passeur, les restaurants, mais aussi les pêcheurs et les plaisanciers. L’idée de devenir ‘modestement) ambassadeur de ce terroir a ainsi germé.
J’avais déjà des compétences dans le tourisme, l’animation et l’accueil. Le lien s’est fait naturellement et ma prestation est un mélange de tout cela. Alors, est-ce le hasard ou le destin? À moins que ce soit l’inverse! Mais en tout cas, ce lieu était fait pour moi.
Quelle est l’ambiance durant ces croisières?
Un moment de simplicité et de convivialité…et la nature nous offre son silence et sa beauté…un vrai havre de paix.
Le concept changé a-t-il depuis un an? Avez-vous des projets pour faire évoluer la formule?
Le concept évolue par les demandes des clients. Au début je n’avais que des huîtres puis j’ai ajouté d’autres fruits de mer et du poisson fumé. Cette année et je me lance des les saveurs d’algues, encore un produit naturel que nous offre notre littoral. Sinon j’essaye d’être toujours a l’écoute, à l’affut de nouveauté…
Le PNR, dont fait partie la rivière de Pénerf, fête ces jours-ci ses 2 ans, est-il, selon vous, suffisamment mis en valeur? Auriez-vous des suggestions pour valoriser davantage cette ressource et ce patrimoine?
Je ne le savais même pas c’est pour vous dire. Tout est encore à faire pour valoriser ces ressources et ce patrimoine avec tous les acteurs locaux. Je suis demandeur et intéressé pour mettre en avant toutes les facettes de ce parc.
Beaucoup de Kervoyalais sont venus faire vos croisières, envisagez-vous d’en faire au large de notre si belle baie?
Malheureusement ce n’est pas à l’ ordre du jour, le bateau n’est pas fait pour aller en mer. Mais ce serait possible avec une autre embarcation, j’y réfléchis.
Merci beaucoup et bonne saison à vous.
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Les Saveurs de Pénerf
Cale de Pénerf/Pencadenic / 56750 DAMGAN
06 84 39 36 86 / lessaveursdepenerf@gmail.com